Le changement climatique n’est pas le seul événement écologique majeur à remettre en question nos modes de vie, nos économies, et le sens du mot « progrès ». J’ai maintes fois eu l’occasion d’expliquer pourquoi la chute de la biodiversité, plus rapide, plus brutale encore que le changement du climat, constituait une menace existentielle. Encore moins commenté, débattu, et corrigé, est l’épuisement des terres.
Le phénomène est pourtant bien connu et mesuré, d’abord, ses conséquences bien identifiées, depuis longtemps déjà, et leur gravité n’a plus à être démontrée. Peu suspect d’être un idéologue « vert », le Président de Nestlé avait prévenu, voici plus de dix ans ; la perte de matière vivante des meilleures terres européennes menace la production alimentaire.
Causes et conséquences de l’épuisement des terres
Trois causes principales expliquent une perte de la matière vivante des terres agricoles en même temps qu’une diminution de leur capacité à se régénérer. La première est la surexploitation, ou exploitation forcée au moyen d’ajouts, d’apports, de compléments chimiques, qui ont pour premier effet d’épuiser la terre, en quelques années ou quelques générations. Le second est le machinisme, qui écrase toute forme de vie sur plus d’un mètre de profondeur partout où passent les monstres que sont aujourd’hui les machines agricoles, la course au plus gros, au plus lourd et au plus cher ne connaissant pas de fin. Le troisième est la monoculture, c’est à dire la culture sur de grandes surfaces exclusivement d’un seule plante ou variété de plantes.
L’importance des pratiques agricoles traditionnelles
La terre qui meurt n’est pas une fatalité, ni le résultat d’un changement climatique qui n’en est qu’à ses débuts, par ailleurs contrastés selon les régions, les latitudes et les territoires – s’il est un domaine où les générations globalisantes sont fausses, c’est bien celui-là ! La terre qui meurt, est le résultat de ce qui a été présenté comme la modernisation des techniques agricoles, comme le moyen de progrès des rendements à l’hectare, et comme l’effet de la chimie agricole, de plus en plus invasive et massive.
S’il est une menace sur l’alimentation mondiale, c’est bien celle-là. Les chercheurs ont établi que cultiver ensemble une céréale et une légumineuse assure à la fois des transferts d’éléments nutritifs entre les deux, et une réduction des herbicides nécessaires. Selon une démarche déjà bien analysée par l’INRAE en France, ils confirment que le rendement global peut s’accroître de plus de 25 % quand deux cultures complémentaires sont associées, avec un revenu supérieur pour l’agriculteur du fait de la réduction des intrants, engrais ou pesticides et herbicides.
Rétablir les rôles des institutions agricoles
Enfin, et surtout, des institutions n’ont pas joué et ne jouent pas leur rôle, en servant de faire valoir aux industriels. En France, la question des Chambres d’agriculture est posée. Établissements administratifs, elles ont été colonisées par les industriels, l’agrochimie, la banque et le syndicat majoritaire rallié à leurs intérêts. L’Etat n’a pas joué son rôle. Il doit l’assumer désormais. Restaurer le rôle des chambres d’agriculture et de l’enseignement agricole au service des agriculteurs, et pas de ceux qui réduisent l’agriculture française au rang de faire valoir des monopoles mondiaux de la nourriture, des terres et de la vie, voilà un objectif que les Localistes poursuivront en priorité.
Dans le monde qui vient, tout le monde est ou sera localiste.
La tempête de novembre l’a encore prouvé, comme d’autres évènements climatiques extrêmes. Les victimes des guerres et des invasions le savent bien ; le lieu de vie et le voisinage sont essentiels, et peuvent faire toute la différence entre la vie et la mort. Le territoire compte, et les milliers de morts en Israël et en Palestine, au Donbass ou en Arménie sont là pour le crier ; non, nous n’en avons pas fini avec la terre qui est sous nos pieds, chaque pays n’existe que par l’attachement d’un peuple au territoire sur lequel il fait sa loi et choisit son destin. Et, partout dans le monde, des peuples souffrent et meurent pour garder leur territoire, du Haut Karabagh au Soudan et du Yémen à la Palestine.
La tentation politique du ruralisme
C’est l’évidence pour ceux qui vivent à la campagne, hors de la ville, les « ruraux ». La tentation est d’en faire des modèles, de rêver du retour à la terre, et de déplorer « la terre qui meurt », « la mort du village », parce que, n’est-ce pas, « la terre ne ment pas ! » Et la tentation est d’en faire un thème politique, d’en appeler à la campagne pour refaire la France, et de mobiliser pêle-mêle chasseurs, paysans et néoruraux, pour en faire un parti de la ruralité, viser des élus, et pourquoi pas, un ministère. À l’initiative de Thierry Coste, le Président de la Fédération des chasseurs, Willy Schraen, n’y a pas résisté. Une liste dite ; « De la ruralité » figurera dans la course au Parlement européen, pour les élections du 8 juin prochain.
L’illusion se cache derrière le nom. Nombre d’urbains aussi aiment la marche à pied et le barbecue, les prairies et les forêts, et combien rêvent d’une ferme à retaper ! Et nombre de ruraux rêvent d’ascenseurs, de trottoirs bitumés, de transports publics et du minimarché au carrefour ! Tous subissent la déshumanisation de l’enfer numérique, et demandent que plus jamais ils n’entendent une voix artificielle leur répondre ; « tapez 1,2,3… » après un appel d’urgence. Et tous s’inquiètent de la hausse des prix alimentaires, des coûts de l’énergie, et des cambriolages !
La supposée singularité de la vie rurale par rapport à la vie urbaine, telle que l’évoquent ceux qui surfent sur les lieux communs de la nostalgie, est un leurre politique. Elle n’est pas suffisante pour fonder un projet politique. La réalité statistique est que les ruraux achètent au supermarché comme les autres, qu’ils passent leurs soirées devant les écrans comme les autres, et que s’ils se plaignent, c’est d’abord parce qu’ils ne bénéficient pas des facilités de la ville, et même, de la grande ville ; médecins proches, commerces et restaurants à cinq minutes, salles de spectacles, trottoirs et rues éclairées le soir ! La réalité est que la proximité idéalisée avec la nature, du lever tôt le matin avec le soleil au feu de bois dans la cheminée, de l’eau du puits au potager et au verger, du printemps plein d’oiseaux aux randonnées dans la neige l’hiver, est d’abord et très majoritairement vécue comme contrainte, incertitude, voire risque, comme cela a toujours a été le cas pour ceux qui vivent avec les éléments naturels – ou ce qu’il en reste – ; agriculteurs, forestiers, jardiniers… La tempête a déraciné des arbres qu’il faudra couper, les limaces ont ravagé les salades, et les pommes pourrissent avant maturité cette année, qui sait pourquoi !
Plus sérieusement, l’ultraconcentration urbaine, la métropolisation forcée, commandent la diffusion partout, même dans les campagnes les plus reculées, de modèles de vie, de consommation et de loisir qui sont des modèles urbains ; artificiels certainement, superficiels si l’on veut, mais combien de Français ont envie d’une vie de moine ou de renonçant – même au jardin ? Les lecteurs de « Limites » vont hurler, mais la majorité des ruraux ne se distinguent en rien des urbains par leurs rêves, leur souci de confort et de mode de vie – et une partie des « réformes » portées par l’écologie punitive n’aide pas, notamment celle qui va rendre ni louable, ni vendable, un tiers du patrimoine immobilier français, presqu’entièrement en zone rurale, et qui va priver les propriétaires de voitures anciennes comme les retraités de la liberté de se déplacer (le Parlement européen s’apprête a voter une directive qui obligera les conducteurs de plus de 65 ans à suspendre leur permis de conduire tous les cinq ans, sous condition d’examen médical!)
Le monde rural a ses propres revendications et des priorités spécifiques. Mais elles n’en font pas un monde à part. Mais elles ne peuvent fonder un projet politique national distinctif, encore moins une identité politique capable de conduire au pouvoir. Quel avenir propose un rassemblement hétéroclite de chasseurs du dimanche, venus des beaux quartiers, de retraités qui voient fermer autour d’eux les derniers lieux de vie, épicerie, café, pharmacie, et d’héritiers rêvant de la France d’avant, celle du banc d’église et des métayers déférents ? Quel mensonge que la promesse du grand retour, quand il n’y a jamais, jamais de retour en arrière dans l’histoire ! Et aussi, quel cynisme de travestir ainsi la question des inégalités sociales et territoriales, que la séparation entre urbains et ruraux évacue au profit d’une petite minorité – d’urbains !
Vers une nouvelle vision politique : le localisme
S’il est un projet politique, c’est celui d’un nouveau rapport au territoire, à la société, à la vie et au monde. S’il est un projet politique, c’est celui qui part au contraire de la similitude entre l’habitant d’un quartier d’agglomération, et l’habitant d’un village de la Corrèze ou du Finistère. Tous veulent vivre en sécurité et en paix. Tous veulent que leurs vieux parents comme leurs enfants profitent d’une eau pure, d’un air sain, d’une alimentation de qualité, sans OGM, et qu’ils profitent de la vie. Tous ont envie que les réseaux fonctionnent, que les services publics comme les commerces restent ouverts, et que la santé demeure un service assuré à tous et partout. Et tous veulent aussi voyager, choisir leur lieu de vacances, et en un mot, profiter de la vie, dans leur maison ou leur appartement, bien chez eux, bien dans leur quartier, bien avec leurs proches. Qualité de l’espace public, qualité de l’environnement, qualité des services publics, faut-il y ajouter capacité de décider de ce qui les concerne, faculté de s’informer, de débattre et faire ses choix, et liberté de voter ses lois, de décider de ses cœurs, et d’affirmer son identité ?
Les Localistes ! travaillent à refaire l’unité des Français. Ce n’est pas en divisant, en opposant ruraux et urbains, qu’on y arrivera ! C’est au contraire, en les unissant dans un combat commun pour la démocratie, pour la liberté, pour la paix.
Cette unité appelle d’abord, et d’urgence, le retour au respect de la démocratie, c’est-à-dire du suffrage universel, seul capable de conférer la légitimité aux lois et au droit. Qu’on en finisse avec ce coup d’Etat du droit, avec ces « autorités administratives indépendantes » qui s’arrogent des compétences qui n’appartiennent qu’au peuple et à ses élus, et qu’on en finisse avec les élucubrations constitutionnelles de ceux qui veulent que le juge invente le droit pour en finir avec les Nations et les peuples ! Halte au coup d’Etat du droit, contre nos traditions, nos PME et nos territoires !
Cette unité s’appelle liberté, quand elle s’attaque au pouvoir exorbitant, totalitaire, que quelques groupes mondiaux, dans l’alimentation, dans la pharmacie, dans la finance, ont conquis sans vacarme et sans débat, et qui permet à des monopoles d’imposer leurs prix, leurs conditions, aux Etats comme aux peuples, d’en finir avec la démocratie, la souveraineté, et plus encore, avec la faculté de choisir. Qu’en finisse avec la mainmise des multinationales, à travers ONG, Fondations et lobbys, sur tous les centres de décision européens, à commencer par la Commission, et sur les institutions internationales ! Comment des Nations peuvent-elles abandonner à une Organisation mondiale de la Santé, ni élue ni représentative, l’autorité en matière d’épidémies et de vaccins ?
Cette unité s’appelle politique de la vie. La guerre conduite contre la vie au nom de la technique et du profit menace notre existence même. Tous les Français veulent transmettre une France plus belle, plus saine et plus vivante. Et tous veulent une France libre, en paix, et française. Y travailler commence par faire la paix avec la nature, respecter la diversité des espèces, imposer des limites à l’artifice et à la technique – si nous ne reprenons pas le contrôle de la technique, la technique nous contrôlera entièrement. C’est redécouvrir les libertés locales, réinventer la décentralisation, comme cette subsidiarité qui redistribue les pouvoirs, les initiatives et les moyens. Y travailler se poursuit par la redécouverte du monde, des autres, et de nous-mêmes. Dans le respect, la curiosité, et l’émerveillement.
Ensemble, à la redécouverte du bonheur de vivre sur des territoires sains, dans une nature apaisée, et riches de ce premier bien commun, la volonté de demeurer, c’est par le Localisme comme unité, comme pratique et comme choix, que nous pouvons agir.
La tête de liste RN aux Régionales dans les Pays de la Loire et eurodéputé affilié au RN était l’invité du Talk – Le Figaro ce mardi 9 mars.
Cofondateur du parti localiste, un mouvement qui a son autonomie et «qui rassemble à gauche comme à droite», a-t-il précisé, Juvin a vanté l’écologie «de la joie de vivre» proposée par le RN face à «l’écologie gadget» du gouvernement, du «fondamentalisme vert» de certains élus écologistes et d’une partie de la gauche. «Nous sommes les vrais écologistes» a martelé l’eurodéputé, raison pour laquelle le RN, «qui exprime les préoccupations des Français, s’est saisi de ce sujet de l’écologie».
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